jeudi 16 juillet 2020

Qu'est-ce que le genre Fantastique?



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"Yet, mad am I not—and very surely do I not dream. But to-morrow I die, and to-day I would unburden my soul." Edgar Allan Poe, The Black Cat

Bonjour à toi qui veut bien m'accorder quelques minutes de ton temps pour lire ces quelques lignes!

Résultat de recherche d'images pour "the oval portrait"J'espère que tu as fêté Halloween dignement, et que tu es fin prêt(e) pour affronter l'hiver et l'enfer des étendues glacées, car tu sais maintenant ce qu'elles dissimulent. Nous allons aujourd'hui, en vue de futurs articles, éclaircir un point nécessaire, celui du genre que l'on appelle le fantastique. C'est en effet un mot que l'on entend très souvent, et qui semble pouvoir qualifier un bon nombre d'oeuvres. Tu remarqueras que certains affirment que Le seigneur des Anneaux, c'est du fantastique, mais que ça de Stephen King, c'est aussi du fantastique, alors que finalement, ces deux textes n'ont pas grand chose en commun.

Nous avons donc ici affaire à un abus de langage, car aucun des deux titres cités auparavant n'entre dans la catégorie fantastique. Mais alors, me direz-vous, qu'est-ce que le fantastique? Quand savons-nous que telle ou telle oeuvre est fantastique? Ne vous inquiétez pas mes amis, je vais vous donner quelques clés. Restez bien attentifs, et laissez -vous guider par les mots!

La source dont je vais me servir ici et que je vous conseille vivement de lire s'appelle Introduction à la littérature fantastique de Tzvetan Todorov, immense théoricien de la littérature à qui l'on doit aussi l'excellent La littérature en péril. Je vais m’efforcer de vous résumer le travail de Todorov de la manière la plus accessible possible, dans l'espoir que vous puissiez briller en société lorsque l'on vous parlera de fantastique.


Pour qu'il y ait fantastique, il faut plusieurs conditions préalables: 
1- il faut tout d'abord un monde, notre monde, avec ses règles qui nous sont si familières,
2- un événement se produit au sein de ce monde, qui semble aller à l'encontre de nos règles, 
3- on tente de trouver une explication à cet événement, a) soit une explication rationnelle, ainsi les règles du monde fonctionnent toujours. b) ou alors, l'explication que l'on trouve démontre que notre monde obéit à de nouvelle règles dont on ignorait l'existence. 
Eh bien mes amis, le genre fantastique c'est précisément cette hésitation entre les deux explications, ce petit moment d'indécision qui peut parfois s'éterniser, tout dépend de l'oeuvre. Le fantastique est en fait une sorte de pont entre deux autres genres.


Résultat de recherche d'images pour "yog sothoth"En effet, si les règles de notre monde fonctionnent toujours à la fin du récit, nous sommes dans du surnaturel. Par contre, si l'on se rend compte que ces mêmes règles ne sont plus valables et qu'il en existe des nouvelles, nous tombons dans le genre merveilleux. Si l'on réfléchit un peu, on se rend compte que finalement peu d'oeuvres artistiques peuvent être considérées comme pleinement fantastiques, ainsi Le seigneur des Anneaux sera plus considéré comme de la fantaisie, un genre dans lequel les modifications des règles font partie du monde (on ne prend pas pour point de départ "notre monde"). Le problème principal est que l'anglais distingue mal fantastique et fantaisie, car il traduit les deux mots par "Fantasy", d'où l'abus de langage observé précédemment. Autre exemple, relatif à l'horreur cette fois-ci, les écrits de Lovecraft font partie du coté merveilleux du fantastique, et même si le mot semble mal choisit pour décrire Lovecraft, il n'en demeure pas moins que l'horreur en général se situe du coté merveilleux (par exemple le ça de King), ce qui est confirmé par Carrol dans The Philosophy of Horror (voir article dédié du 14 octobre 2018).


Un véritable récit fantastique serait Le Portrait Ovale d'Edgar Allan Poe, pour lequel il est extrêmement difficile, voir même impossible, de trouver une explication (je vous mets au défi !).
J'espère que ces quelques informations vous seront utiles et vous permettrons d'appréhender le fantastique d'une manière différente. Ce fut pour moi un plaisir de vous écrire, comme toujours, et je vous dis à plus tard pour de nouveaux articles!

T.G. 

mardi 14 juillet 2020

The Last of Us Part II : Le test

Jeux vidéo : The last of us Part II, à jamais | Les Echos

[ALERTE SPOILER: The Last of Us Part 2 étant un jeu qui repose "principalement" sur son récit, la présence de spoilers n'est pas à exclure. Le cas échéant, ils seront signalés et se trouveront en majorité dans la section consacrée à l'écriture. Les images utilisées ne sont pas issues de ma propre capture.]


Bonjour à toutes et à tous, soyez les bienvenu.es dans ce nouvel article consacré à un jeu qui a, semble-t-il, profondément divisé son public. Si vous avez suivi l'actualité du jeu-vidéo récemment, alors vous avez forcément entendu parlé de de la dernière création du studio américain Naughty Dog, je parle ici de The Last of Us Part 2, sorti le 19 juin 2020, exclusivement sur Playstation 4. 

Comme son aîné avant lui, ce jeu vient conclure la génération Playstation 4, et nous révèle le plein potentiel de la console dans un chant du cygne à la fois morbide et terriblement majestueux. Le but de ce test n'est pas d'alimenter une polémique stérile qui anime le fin fond des forums, mais plutôt de voir concrètement ce que vaut le jeu (c'est le but premier d'un "test", vous en conviendrez). Grace à cette approche, les polémiques artificielles se dissiperont d'elles-mêmes. 

La structure du test sera assez classique, divisée en sections dédiées aux différentes dimensions qui compose le jeu: les graphismes, le gameplay, la musique/le son, et enfin l'écriture. Je m'efforcerai dans ce test d'apporter autant de précisions que possible, dans l'espoir d'être utile à ceux qui ont fini le jeu, mais aussi à ceux qui hésitent à mettre les mains dessus. Installez-vous confortablement, et laissez-vous guider par la plume de votre hôte. 


Introduction: Retour en 2013, là où tout a commencé


Avant d'aborder le deuxième opus, il est essentiel de parler du premier. Etant possesseur à l'époque d'une Xbox 360, je n'ai pas fait le jeu à sa sortie. Je l'ai fait plus tard sur Playstation 4, à l'occasion de la sortie de la version remastérisée. Je considère ce premier opus comme un très bon jeu, mais pas comme le jeu de la génération PS3, comme certains ont essayé de nous convaincre. The Last of Us était technologiquement impressionnant, même sur PS4 (on déplorait toutefois un manque de fluidité sur PS3). Les environnements, les visages, les animations... Rien à dire à ce niveau. L'écriture est assez irréprochable, les personnages ne sont pas des archétypes et deviennent plus profonds à mesure que le récit progresse. 

The Last of Us: New screenshots - MLW Games

On retiendra de plus ce non-dit qui met un terme à l’épilogue du jeu, et laisse le joueur en suspend, à la manière d'une nouvelle d'Edgar Allan Poe. C'est cependant le gameplay qui a sans doute le plus perturbé mon expérience. Certaines phases d'infiltration étaient particulièrement frustrantes et brouillonnes, et la boucle de gameplay devint vite répétitive. Un bon, très bon jeu donc, mais pas au niveau d'un Mass Effect 2 ou d'un Red Dead Redemption. Le potentiel était pourtant là, indéniablement.  


Partie 1: Le visuel


Pour être honnête, je n'attendais pas grand chose de ce Last of Us Part 2, et je pensais même passer à côté. C'est sans doute en voyant l'amoncellement de critiques négatives que je me suis décidé à me le procurer, afin de voir si les avis étaient fondés. La stratégie de communication semble avoir fonctionné. 

The Last of Us 2 délivre une série de screenshots et quelques ...

La première chose à laquelle nous sommes confrontés avant d'entrer dans l'histoire, ce sont les graphismes, l'aspect visuel du jeu. De ce côté-là, le jeu ne déçoit pas. On aura rarement vu quelque chose d'aussi beau sur Playstation 4, peut-être à l'exception de Red Dead Redemption 2. Le soin apporté aux détails des niveaux, ainsi qu'aux éclairages, participe à la création de zones uniques, avec chacune leur atmosphère propre. 

Vous l'aurez compris, cette section sera courte, car à l’exception de quelques textures baveuses en arrière plan (j'en ai compté deux dans toute ma progression), le jeu est graphiquement irréprochable (vous disposez aussi d'un mode photo très complet, afin de capturer vos instants favoris). 


Partie 2: Le gameplay


Cet aspect peut sembler paradoxal, je m'explique. La boucle de gameplay en elle-même ne diffère pas vraiment du premier jeu. On retrouve le système d'artisanat très intuitif, les phases d'infiltration, et les phases de combats. Ces aspects sont en revanche bien mieux maîtrisés dans ce deuxième jeu. Les zones plus ouvertes rendent l'infiltration particulièrement stressante, si bien que dans les niveaux de difficulté les plus élevés, la moindre erreur peut vous coûter la vie (l'implémentation des chiens qui flairent vos traces participe grandement à cette dynamique). 

La création d'objets en temps réel fonctionne toujours aussi bien, et les différents arbres de talents vous permettront d'orienter la progression de votre personnage, qui peut devenir un professionnel de la discrétion tout comme un expert dans la confection de pièges mortels. 

LIMITED EDITION THE LAST OF US PART II PRO BUNDLE - PlayStation

Le système de combat est rudimentaire mais efficace. Outre un système de visée à distance des plus classiques, on trouve un système de combat au corps à corps qui repose sur deux boutons, esquive et coup. Cela parait risqué, mais la fluidité et la qualité des animations rendent le tout très agréable à regarder, et avec plusieurs ennemis sur le dos, c'est loin d'être facile. 

On apprécie aussi un peu de fraîcheur dans le bestiaire, qui accueille des nouveaux venus au sein de la classe des infectés (les rôdeurs vont vous faire sursauter et redouter chacun de vos pas).  Les patrouilles avec les chiens sont aussi bienvenues, et peuvent changer drastiquement vos plans d’infiltration afin de vous forcer à improviser. Le gameplay est plus poli, plus agréable, bien moins frustrant. 


Partie 3 : La musique/le son 


Les différentes musiques (composées par Gustavo Santaolalla) sont globalement de très bonne facture, mais on peut regretter néanmoins leur discrétion. Elles sont présentes au bon moment certes, mais pas assez à mon gout. 

C'est plus sur le traitement du son que je tiens à attirer votre attention. La qualité de ce traitement est perceptible pendant les affrontements, en particulier lorsque vous vous faites repérer par vos ennemis. Ces derniers se mettent alors à communiquer, les balles fusent, et vous vous retrouver immédiatement au sein d'une zone de conflit. Si certains connaissent, ces phases de combats m'ont rappelé Spec Ops: The Line, un jeu exemplaire dans son ambiance sonore. 

Cette mécanique s'applique aussi aux phases avec les infectés, en particulier pour les claqueurs, mais le premier jeu faisait déjà un travail honorable à ce niveau là. 


Partie 4: L'histoire 


SPOILERS: Je vous invite à descendre jusqu'à la partie "conclusion", si vous ne souhaitez pas vous faire dévoiler certains pans de l'intrigue. 

ZONE SPOILERS *****************************************************************

The Last of Us Part 2 reprend quelques années après le premier jeu, et nous place dans une première partie dans la peau d'Ellie, puis dans une deuxième partie dans la peau d'Abby, un personnage inédit jusque-là. 

Si le premier jeu se concentrait sur la relation entre Joel, un père meurtri par la mort de sa fille, et Ellie, une jeune fille immunisé au cordyceps, champignon infectieux qui a précipite la chute de l'humanité, le deuxième jeu (après une série d’événements inattendus) se focalise sur le développement d'Ellie. 

Le début de l'histoire reflète une véritable prise de risque de la part de Naughty Dog, prise de risque qui divise forcément les joueurs, et explique une partie des mauvaises critiques. L'histoire s'amorce donc dans une première partie focalisée par Ellie qui est accompagnée par Dina, un personnage qui fait miroir avec Joel dans le premier jeu. Cette partie est ponctuée par des analepses (des retours en arrière) qui permettent d'aborder certains pans de la relation entre Joel et Ellie. On se rend aussi malheureusement compte, après ces analepses, que le personnage de Dina est un peu creux, du moins comparée à Joel. Elle n'a pas vraiment le temps de se développer au sein de l'intrigue. On regrette aussi certaines longueurs dans cette première partie du jeu, mais rien qui n'entache la progression générale du jeu. Les environnement de cette partie sont splendides, mais peu variés. 

The Last Of Us Part II - Naughty Dog Mag'

Cette première partie se conclue par la rencontre avec Abby, que l'on contrôlera par la suite. C'est là, véritablement, que le jeu prend son envol. Que les choses soient claires, Abby n'est pas un personnage "transgenre" (et quand bien même, cela ne devrait jamais être problématique), c'est concrètement une jeune fille qui fait de la musculation (alors oui, elle a des muscles, c'est normal). Ces considération mises de coté, on peut maintenant se concentrer sur cette partie de l'histoire. 

Abby est un personnage avec lequel l'on n'a pas nécessairement envie de jouer, mais Naughty Dog arrive à faire l'exploit d'éclipser tout bonnement Ellie. L'écriture du personnage y est pour beaucoup, car on retrouve dans Abby une profondeur rarement atteinte dans le domaine vidéoludique. Je n'en dévoile pas plus, mais je vous encourage à vous forger votre avis.

Les environnements de cette partie sont plus variés, et certains niveaux sont un véritable plaisir à faire, je pense notamment au sous-sol de l’hôpital ou encore à l'île des séraphites. Le jeu est généreux en durée de vie, et ainsi l'épilogue arrive au bon moment, sans que l'on ait l'impression d'une histoire incomplète qui se précipite vers sa fin (ce que je reproche un peu au premier jeu).  

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Conclusion


Ainsi, à la manière d'une pièce de théâtre élisabéthaine ou jacobéenne, The Last of Us Part 2 explore ce motif bien connu de la vengeance, qui entraîne les personnages dans une spirale de haine qui n'épargne rien sur son passage. Le jeu nous offre donc une plongée vertigineuse dans ce que la nature humaine a de plus ignoble, sans nous indiquer comment l'interpréter. Le jeu prend des risques, pose des questions qui restent sans réponse, et nous invite à contempler la perte d'innocence de jeunes adultes perverti par une violence omniprésente.

Eh bien nous y sommes ! Je pense que c'est tout ce que j'ai à vous proposer pour cet article, et j'espère qu'il vous aura plu. Vous l'aurez donc compris, je suis conquis par ce deuxième volet de la série, qui sert de première partie à cette conclusion de la génération PS4, en attendant Ghost of Tsushima.

Je vous retrouve très vite pour un nouveau sujet !

T.G.