lundi 30 décembre 2019

Mes jeux de la décennie !

Bonjour à toutes et à tous ! C'est un grand plaisir de vous retrouver aujourd'hui pour un petit article qui je l'espère, vous plaira.

Demain nous fêterons la fin de cette année, qui sonnera elle-même la fin d'une décennie riche en grands moments vidéo-ludiques ! Je me dois cependant de préciser quelque chose: comme vous l'aurez sans doute deviné, cet article vous présentera une liste de jeux, dix (plus ou moins) au total, qui ont marqué ma décennie 2010-2019. Cependant, il s'agit d'un "top" personnel, fondé à partir des titres qui furent capables de transformer mon identité de joueur, titres auxquels je pourrai rejouer pendant encore des années.

Il est clair qu'il existe autant de "tops" qu'il y a de joueurs, et je compte sur vous pour me dire les jeux qui auront transcendé vos années 2010. Sans plus attendre donc, je vous propose de plonger dans mon top des jeux de la décennie 2010-2019:

10. World of Warcraft: Legion - Le MMO renouvelé 

30 août 2016


Alors oui, je sais, cela commence peut-être de façon un peu bizarre, mais laissez-moi m'expliquer. La franchise World of Warcraft est sans doute celle sur laquelle j'ai, au fil des extensions, passé le plus temps. Sincèrement. Néanmoins, dans l'impossibilité de sélectionner la version classique du jeu (datant de 2004), ou son extension Wrath of the Lich King (2008), j'ai décidé d'inclure Legion, tout simplement car je la considère comme une excellente extension, peut-être même la meilleure de toute la franchise. Après un Warlords of Draenor riche en promesses mais pauvre en contenu, Blizzard nous gratifie avec Legion d'une histoire passionnante, d'un contenu monumental, ainsi que d'une direction artistique époustouflante ! C'est simple, je n'ai pas pu décrocher avant d'avoir fait le tour de tous les nouvelles zones, ainsi que d'une bonne partie du contenu PVE (donjons et raids). Legion, c'est la réponse à la chute progressive de WOW qui avait commencé à partir de Mists of Pandaria (2012), et à la déception qu'avait engendrée Warlords of Draenor. Un challenge de taille, relevé d'une main de maître par Blizzard. Une dixième position bien méritée, empreinte de nostalgie.

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9. The Evil Within 2 - La survivance du Survival 

13 octobre 2017


Sebastian Castellanos, détective torturé par un passé tortueux, s'était illustré une première fois en 2014 à travers le premier The Evil Within, un jeu particulièrement attendu puisque conçu par le papa de la saga Resident Evil, monsieur Shinji Mikami. Après quatre chapitres très prometteurs, The Evil Within bascule malheureusement dans une certaine surenchère d'action qui se perd dans les méandres d'un scénario bien trop cryptique. Il y avait cependant indéniablement un certain potentiel. Affaire à suivre.
Il ne faut attendre que trois ans, puisqu'en octobre 2017, un certain The Evil Within 2 débarque sur nos machines, et à cet instant, une magie macabre se met à opérer. Les petits défauts sont corrigés, le bestiaire est varié, effrayant, repoussant. La direction artistique est horriblement magnifique (je vous renvoie au dernier niveau du jeu). On pardonne presque l'intelligence artificielle bancale, qui rend les phases d'infiltration un peu brouillonnes. Le survival horror n'est pas mort, sachez-le.

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8. Gears of War 5 - MAIS JE RÊVE, UNE BERSERKER !?

10 septembre 2019


Eh oui ! Un jeu de cette année figure dans ce top ! Gears of War est une franchise que j'affectionne tout particulièrement, que j'ai pu découvrir grâce à mon "big bro" Robin, à qui je dédicace cette sous-partie. J'avais pensé à mettre le troisième volet de la franchise, puis je me suis souvenu de la campagne, et notamment du rythme haché dont elle souffrait. Non content de s'imposer comme un nouvel étalon graphique, Gears 5 se distingue par une campagne cette fois-ci admirablement rythmée, un gameplay viscéral comme jamais, une écriture "nanardesque" comme on n'en fait plus, bref, la plus grande campagne depuis Gears of War 2, qui dépasse sans peine le quatrième volet, beau mais plutôt plat.  On apprécie aussi grandement l'implémentation de zones semi-ouvertes, un peu à la manière d'un Uncharted, qui se fait d'une manière assez fluide et dynamique. Rien à redire sur ce Gears. Vivement le prochain opus.





7. God of War - LA CLAQUE  

20 avril 2018


Littéralement, l'un des jeux qui a le plus rentabilisé ma PS4, une claque monumentale que je ne suis pas prêt d'oublier. Que dire de God of War ? Il serait en effet ardu de résumer les qualité d'un tel jeu (et ce n'est que le top 7, je ne sais pas comment je vais faire à partir du top 3...). Bon, alors pour commencer, c'est beau, c'est très très beau, osons le dire, c'est une prouesse technique, un chef d'oeuvre d'optimisation. Le tout est combiné à une direction artistique puisant allègrement dans la mythologie nordique, tout en conservant l'ADN de la saga originelle. La précision du gameplay est aussi à souligner, autant dans le maniement des armes que dans les différents combos disponibles. C'est violent, implacable, on ressent chaque impact, chaque blessure, il pleut des particules à l'écran... God of War est un véritable spectacle, et nous rappelle que le jeu-vidéo n'a rien à envier aux autres médias. Une exclusivité PS4 à ne manquer sous aucun prétexte.

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6. Horizon Zero Dawn - Impossible de décrocher 

1 mars 2017


Eh bien, une exclusivité PS4 à la suite d'une autre exclusivité PS4, c'est à se demander si l'auteur n'est pas lui-même sponsorisée par la firme Japonaise... Alors non, pas du tout, et cela ne risque pas de se produire. J'étais obligé de citer ce jeu, créé je le rappelle par les concepteurs de la saga Killzone, qui, une fois libres de libérer leur créativité et de faire autre chose que des titres pour concurrencer Halo, nous ont gratifié d'une expérience que je ne suis pas prêt d'oublier et dont j'attends la suite avec impatience. Vous avez le droit de reprendre votre souffle, cette phrase était longue. Horizon, c'est pour moi l'expérience en "open-world" qui se rapproche le plus de la qualité de The Witcher 3. Graphiquement irréprochable, artistiquement innovant, Horizon Zero Dawn est un titre unique, une bouffée d'air frais dans le paysage vidéo-ludique, dont l’héroïne Aloy parvient sans peine à se hisser parmi les grands. Foncez vous le procurer, vous ne le regretterez pas !

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5. Red Dead Redemption - Un avant et un après 

21 mai 2010 


Alors là on attaque les choses sérieuses, pas encore "très sérieuses", mais sérieuses quand même. On peut s'interroger sur la raison pour laquelle j'ai préféré prendre le premier épisode, c'est tout à fait légitime. C'est assez simple finalement. Red Dead Redemption 2 est parfaitement exécuté, mais ne diffère pas fondamentalement de son grand frère. En clair, il n'apporte pas grand chose de plus, même si l'on ne peut nier ses multiples qualités. Comme indiqué dans le sous-titre, Red Dead Redemption représente une sorte de rupture entre deux conceptions de ce que doit être un monde ouvert. Contemplatif, cohérent, violent, réaliste, émouvant, inoubliable, tels sont les adjectifs qui me viennent à l'esprit lorsque je repense à cette épopée légendaire aux cotés de John Marston, dont on aimerait qu'elle ne se finisse jamais. Red Dead Redemption, c'est le jeu qui m'a prendre conscience de l'importance d'avoir des personnages profonds et bien écrits, encore plus que n'importe quelle oeuvre littéraire, ce qui semble assez paradoxal, je vous le concède. Un titre de début de décennie, la boucle est bouclée.

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4. Dead Space 2 - L'après Silent Hill 2 


25 janvier 2011


Voilà donc le jeu qui parvient à se hisser au pied du podium, et il mérite absolument sa place. Le premier volet étant sorti en 2008, il m'était impossible de le faire figurer dans ce top. Qu'à cela ne tienne, son petit frère le surpasse en tout point, un exploit à souligner. Dead Space 2 devient culte dès les premières secondes, et je reste persuadé que cette séquence en camisole constitue l'un des plus grands moments de l'histoire du jeu-vidéo, tout simplement. Ce titre, c'est l'angoisse à chaque instant, qui vient s'instiguer dans l'esprit du joueur, et qui l'accompagnera pendant qu'il rejoint son lit après une longue session nocturne. Graphiquement impressionnant, doté du gameplay jouissif de son aîné, ainsi que d'une bande son littéralement parfaite et inégalée dans un Survival, Dead Space 2 est l'équivalent dans les années 2010 de Silent Hill 2 dans les années 2000. A faire, refaire, et au casque, cela va de soi.

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3. Bloodborne - Inégalable adaptation Lovecraftienne 


24 mars 2015 


Il nous fallait dans ce top un jeu conçu par From Software, et quelle difficulté de choisir un titre, car ils sont plusieurs à mériter leur place (j'en retiens trois: Dark Souls 3, Bloodborne, Sekiro- Shadows Die Twice). Il va me falloir justifier mon choix, bien entendu. Peut-être tout d'abord pour l'audace de s'être affranchi à ce point des codes classiques de la Fantaisie. Bloodborne ne ressemble à rien d'autre que lui-même, ce qui, si l'on prend le temps d'y réfléchir, n'est pas si courant que ça. Il convient ensuite de parler de son gameplay, moins rigide que celui d'un Dark Souls, qui repose non pas sur le timing, mais sur l’agressivité du joueur, sa capacité à ne jamais cesser d'attaquer, tout en gérant comme d'habitude sa barre d'endurance. Bloodborne, c'est aussi ce moment d'émerveillement horrifique qui accompagne la découverte de la ville de Yarhman, et qui suivra chaque nouveau niveau. ll faut aussi mentionner les boss, qui ici rattrapent la platitude de Dark Souls 2.
Dédicace spéciale au contenu additionnel The Old Hunters, un voyage dont on ne ressort pas indemne, tant physiquement que mentalement. On note aussi la patte Lovecraftienne du titre, qui adapte indirectement avec brio l'univers de l'écrivain de Providence. Pour rappel, mon mémoire de recherche, qui se focalise sur l'influence d'Edgar Allan Poe et de H.P. Lovecraft sur l'horreur américaine, s’intéresse au cas de Bloodbornehttps://gallardscabinetofcuriosities.blogspot.com/2019/06/harold-blooms-anxiety-of-influence.html .

N'hésitez pas à aller voir si vous avez quelques heures à perdre !

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2. Mass Effect 2... et 3 ! - La meilleure saga de tous les temps ? 


26 janvier 2010

6 mars 2012

Le choix cornélien... Eh oui, contrairement à, semble-t-il, la majorité des joueurs, j'ai adoré Mass Effect 3 ! Mais oui ! Je vous assure ! Ah, Mass Effect, si dans des dizaines d'années, des historiens se décident à compiler une encyclopédie du jeu-vidéo, je n'ai aucun doute quant à l'importance qu'ils accorderont à cette saga, qui parvint à se libérer de ses influences pour devenir à son tour "source d'influence". Un cas supplémentaire d'angoisse de l'influence qu'il nous appartiendra d'examiner tôt ou tard.
Je choisis Mass Effect 2 pour la fracture qu'il engendre, pour sa direction artistique, sa technique, sa musique, ses personnages, son incipit, pour le rôle qu'il joua, et qu'il joue encore dans la construction de mon identité de joueur. Je choisis aussi Mass Effect 3 pour les moments inoubliables qu'il nous a fait passés. Je ne parlerai pas de sa "fin", car pour moi cette fin débute dès les premiers instants du jeu, se poursuit lorsque l'on clôture les grands enjeux de la saga (génocide Krogan, Quariens vs. Geths), et ne saurait être réduite à cette dizaine de minutes qui a tant fait parler d'elle.

Si jamais cette saga vous a échappée, foncez vous la procurer. Elle n'a (quasiment) pas vieilli, et vous en ressortirez changés, à jamais.

Image associée

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1. The Witcher 3: Wild Hunt - Le classique parmi les classiques 


19 mai 2015


Bon, les gens qui me connaissent ne seront pas surpris. Sachez qu'il m'a été difficile de départager Mass Effect de The Witcher, car tous les deux apportent un niveau de détail assez inégalé. Néanmoins, je me permets de sélectionner The Witcher 3: Wild Hunt pour l'évolution qu'il apporte à la série. Là ou Mass Effect 3 va dans la continuité de son prédécesseur, The Witcher 3 transforme radicalement la recette de The Witcher 2 et redéfinit ce que signifie "monde ouvert". La preuve, à part Red Dead Redemption 2 (donc trois ans plus tard), aucun monde ouvert ne peut se mesurer à celui de The Witcher, qu'il s'agisse d'écriture, de cohérence, ou même de direction artistique.
Le jeu aura cinq ans dans quelques mois, et je puis vous assurer qu'il n'aura pas pris une ride, et que le "hair works" mangera toujours autant de ressources sur votre carte graphique. Le jeu compte tellement de qualités qu'il m'est difficile de les résumer en quelques lignes, mais j'insisterai cependant sur son écriture, et en particulier sur son premier acte, à Velen, où l'on fait la rencontre du baron sanglant, un personnage haut en couleurs. Ce passage est au jeu-vidéo ce que le début de Quatrevingt-treize de Victor Hugo est à la littérature, des images marquantes, cultes, inoubliables. Mention spéciales pour les deux extensions, Heart of Stone et Blood and Wine, qui remettent à jour ce que l'on est en droit d'attendre d'un contenu téléchargeable.

The Witcher 3: Wild Hunt, c'est du grand art, ni plus ni moins, qui mérite amplement sa première place dans ce top de la décennie.







Mention spéciale à venir: A Plague Tale : Innocence - La France sur le devant de la scène 

14 mai 2019


Un jeu que je n'ai malheureusement pas encore pu tester, mais dont je devine l’intérêt. On se retrouvera dans quelques semaines pour en parler, promis. Je dois avouer être séduit par la direction artistique très macabre, couplée au concept des rats qui envahissent l'écran. A suivre.

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Dernières considérations en chemin 


Mais, me "direz-vous" où est Death Stranding ? Le chef-d'oeuvre de Kojima n'a-t-il pas sa place dans ce top ? Pour répondre rapidement, il se trouve qu'effectivement, Death Stranding ne mérite pas (selon moi, votre avis peut différer, et c'est normal) de figurer ici. Il manque sa place de peu, et nous en détaillerons les raisons dans un prochain article. Patience.

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Pour les curieux, quid de Skyrim ? En effet, The Elder Scrolls V ne figure pas dans les dix. Ses qualités sont évidentes, mais je dois avouer qu'il ne m'a pas marqué plus de raison, dans tous les cas beaucoup moins que son aîné, Oblivion, qui me fascine toujours autant. Skyrim n'en reste pas moins un grand jeu, et je suis persuadé que d'autres sauront bien mieux lui rendre hommage que moi. Je garde quand même en mémoire ma première découverte de Bordeciel, qui même si elle s'est faite sur Xbox 360 (donc en-dessous graphiquement et en sous-résolution), reste un grand moment de mon parcours de joueur.



Quoi qu'il en soi, et parce qu'il faut songer à conclure, l'année 2020 s'annonce riche en promesses, à commencer par les annonces d'une nouvelle génération de consoles, de Cyberpunk 2077, The Last of Us 2, le remake de Resident Evil 3...  Ne nous pressons pas, et attendons de pouvoir poser concrètement les mains sur ces nouveaux titres.

Et vous, quel est votre top de cette décennie? Vos attentes pour la prochaine? N'hésitez pas à me communiquer votre avis, en espérant que ce petit article vous aura diverti !

T.G. 

mardi 3 décembre 2019

Le cas "Death Stranding" partie 1: comment aborder sereinement le jeu ?


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Hideo Kojima. Habituez-vous à voir ce nom "un peu" partout dans le jeu. 
Enfin ! Après son annonce plus que nébuleuse lors de l'E3 2016, Death Stranding s'est finalement dévoilé le 8 novembre dernier en sortant sur Playstation 4 (la date de la sortie PC reste à confirmer). Hideo Kojima oblige - que l'on connait principalement comme étant le "papa" des Metal Gear - le jeu a déclenché une vague de réactions particulièrement contrastées entre les joueurs (les plus courageux n'ont qu'à aller voir la section "avis" de jeuxvidéo.com pour s'en convaincre, ce n’est pas forcément constructif, mais plutôt édifiant). Entre les joueurs qui affirment que Kojima est un génie, et les autres qui écrivent que le jeu n'a absolument aucun intérêt, il semble difficile de trouver un juste milieu.

Pourquoi le jeu divise autant ? Kojima est-il un génie, ce visionnaire du jeu vidéo, trop intelligent pour être compris ? N'avez-vous aucune sensibilité artistique si vous n’accrochez pas au jeu ? C'est ce que nous allons essayer de voir dans ce premier article sur Death Stranding, qui s'attardera à créer une méthode efficace pour aborder ce jeu qui semble à première vue n'être rien de plus qu'un simulateur UPS ou Deliveroo (le sac moche en moins, - quoique -, mais avec tout autant de courage).

Je vous épargne le pire, mais n'hésitez pas à aller voir, les deux extrêmes sont présents.



Pour une théorisation littéraire du jeu-vidéo


Soyons clairs. Je vais tenter de rester le plus lisible et compréhensible possible, comme toujours, mais n’hésitez pas à me contacter si j’échoue dans ma tâche, soit en commentaire, soit sur ma page Facebook. Accrochez-vous, c'est parti. 

Si l’on décide de faire le parallèle entre jeux-vidéo et littérature, on peut partir du principe qu’il y a différentes périodes dans l’histoire du médium vidéo-ludique (le jeu-vidéo), ce qui n’a jusque-là, rien de choquant. La littérature est elle-même passée par plusieurs phases qui, si l’on souhaite résumer grossièrement, s’interrogent sur la manière de rendre par écrit une certaine dimension du réel. Cela englobe la vision de la voix narrative, sa place dans le récit, la caractérisation des personnages, et/ou la capacité du langage littéraire à rendre ce réel. Un petit exemple : dans l’histoire littéraire britannique, le roman réaliste du dix neuvième siècle sera suivi au début du vingtième par le courant dit du "modernisme", qui tente de démontrer la difficulté du support littéraire à reproduire la réalité et construire des personnages cohérents, et qui par conséquent adopte des stratégies différentes pour palier à ce manque. 

Deux visions → "réalisme" et "modernisme" vidéo-ludique 


Le jeu-vidéo peut, par certains aspects, se théoriser de cette façon. Certains titres se rangeraient plus dans une case « réaliste », dont le but est de créer un monde cohérent, avec ses personnages qui lui sont propres, ainsi qu'une histoire relativement crédible dans le contexte (il convient de préciser que ce n’est pas parce qu’un jeu présente un univers de fantaisie qu’il sort de cette case, The Witcher ou Read Dead Redemption seraient deux bons exemples, dans les deux cas c’est la cohérence du monde qui prime, même si la fantaisie s'oppose à la réalité historique). Dans la lignée de ces jeux, d’autres titres vont s’interroger sur la manière de raconter une histoire, et ainsi réfléchir sur comment rendre une forme de voix narrative dans le jeu vidéo. On peut penser aux jeux de From Software, dont l’histoire, même si elle reste plus ou moins cohérente, n’est pas « racontée » de façon conventionnelle, à travers les descriptions des objets. Nous serions plus ici dans le courant « moderniste » du médium, les concepteurs mettent en lumière des systèmes alternatifs qui transforment l'émergence du sens.

CEPENDANT, comme dans la littérature, chaque vision s’adresse à un type de joueurs/lecteurs différent, qui ne cherchent pas tous la même chose. C’est la première étape nécessaire pour aborder Death Stranding. En effet, le titre de Kojima ne cache point ses ambitions de « révolutionner » notre vision du jeu vidéo, et les avis très tranchés montrent que d’une certaine manière, il y parvient (bon, on écarte les « testeurs » qui s’éclatent à congratuler Kojima quoi qu’il fasse, parce que quand même, Quiet dans Metal Gear Solid 5, c’était un peu « beauf », si si je vous assure).

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Kojima, on n'a pas oublié. Pour les lecteur qui ne situent pas, Quiet est un des personnages principaux de Metal Gear Solid 5, qui est censée pouvoir se rendre invisible, d'où son "CAMOUFLAGE corporel". Oui, un CAMOUFLAGE. Tapez "Quiet rain scene" dans Youtube, vous verrez. 

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James Joyce et Virginia Woolf, les principaux représentants du courant moderniste en littérature.
Non mais un CAMOUFLAGE, sérieux ! D'accord, j'arrête. Pardon.

Mais alors, me direz-vous, à qui se destine Death Stranding 


Et vous avez raison de vous poser la question. Sachez seulement que si vous n’accrochez pas à ce type de vision, cela ne signifie en aucun cas que vous êtes un « sous-joueur ». CEPENDANT, et j’insiste sur ce point, détruire le jeu parce qu’il déstabilise certaines conventions n’est en aucun cas un comportement approprié. Death Stranding s’adresse à ceux qui aiment un aspect déroutant, comme lorsque l’on commence un Dark Souls. On ne sait pas à quoi s’attendre, mais on accepte volontiers ce bref moment d’ignorance. A l’opposé, pour un joueur qui recherche l’action, un gameplay souple et riche, une histoire « réaliste et conventionelle », Death Stranding n’est pas forcément le meilleur choix, et encore une fois, il n’y aucun problème avec ça. 

Il convient de préciser que ces considérations ne rentreront pas dans le test final du jeu, il s’agit uniquement d’une méthode, aussi succincte soit-elle, pour aborder en amont Death Stranding. Je pense sincèrement qu’il faut faire ce travail préparatoire lorsque l’on se confronte avec un titre qui semble sortir du canon vidéo-ludique. Un article suivant viendra se pencher plus précisément sur le jeu en lui-même, afin de déterminer s’il tient ou non toutes ses promesses. Je suis actuellement à une vingtaine d’heures de jeu, et j’ai pu identifier la majorité des points qui vont agrémenter mon test « en retard ». En attendant ce jour, j’espère que ces quelques lignes théoriques vous auront permises de lever une partie du voile qui pèse sur Death Stranding, et qu’elles vous pousseront à vous poser des questions, car c’est en refusant toute forme d’interprétation totalisante/unique qu’il devient possible d’appréhender le vaste monde qui nous entoure.


It is a narrow mind which cannot look at a subject from various points of view.”
― George Eliot, Middlemarch (1871-72). 


T.G.